Publiée depuis 1948, la revue International Social Security Review (ISSR) est la plus importante publication trimestrielle internationale en matière de sécurité sociale dans le monde.
Cet article vise à alimenter le débat sur la financialisation des pensions et sur la façon dont les pays adaptent leurs systèmes de pensions pour faire face au vieillissement démographique. Pour ce faire, nous étudions les systèmes de pensions obligatoires canadiens et finlandais, qui se démarquent des tendances mondiales actuelles. Les régimes de pension publique canadiens et finlandais reflètent deux tendances souvent associées à la financialisation des pensions: une dépendance croissante envers les marchés financiers et une politique d’investissement prévoyant une allocation diversifiée des actifs. Toutefois, à l’inverse de nombreux autres pays, le Canada et la Finlande n’ont enregistré aucune hausse du risque d’insécurité du revenu de vieillesse, qui découlerait de la transition d’un régime basé sur des prestations déterminées vers un régime basé sur des contributions déterminées – une tendance qui s’observe pourtant partout ailleurs.
En Algérie, le vieillissement accéléré de la population met à mal la viabilité financière du système de retraite par répartition. Une réforme de ce dernier s’avère nécessaire, qu’il s’agisse de simples réformes paramétriques ou de profonds changements systémiques. Avant d’entamer des réformes systémiques, il serait intéressant de se demander si les réformes paramétriques pourraient suffire à redresser le système sur le plan financier. Dans cet article, nous avons croisé les potentielles réformes aux scénarios socio-économiques possibles par le biais d’une analyse à plusieurs scénarios. Les résultats révèlent que l’équilibre financier du système algérien demeurera négatif à court comme à long terme en appliquant les scénarios les plus prometteurs. La mise en œuvre d’importantes réformes paramétriques permettra uniquement de réduire le déficit et de le maintenir dans la durée. Ainsi, des réformes systémiques devront être adoptées.
Après une décennie d’austérité sans précédent, la Grèce a brusquement repensé sa manière de renforcer son système de pension en 2022 et adopté le financement controversé des pensions personnalisées. Ce dispositif implique qu’une part des cotisations au régime par répartition serve au financement des épargnes-retraites des personnes, ce qui, en conséquence, altère le financement des pensions actuelles du régime par répartition. Quoiqu’inspirée du plan de privatisation des retraites de 1994 de la Banque mondiale, la réforme grecque de 2022 marque un revirement politique majeur, en ce qu’elle confie la gestion des épargnes-retraites des personnes à un organisme gouvernemental dédié, apparemment pour tenter de gommer les défaillances du marché quant à la fourniture des pensions privées. À l’instar des nombreuses réformes adoptées par le passé en Europe de l’Est, les coûts liés à la transition vers ce financement personnalisé, qui mettra plusieurs décennies à prendre forme, ont été largement sous-estimés en Grèce. Cette sous-évaluation donnera lieu à des difficultés budgétaires au cours des prochaines années, alors que les coûts annuels de la transition grimpent et que les conditions favorables des financements internationaux commencent à subir des changements. À moins d’un fort engagement politique permettant d’adopter les mesures nécessaires pour supporter les frais de la transition, la Grèce pourrait devoir abandonner sa réforme, comme nous en avons déjà été témoins dans toute l’Europe de l’Est.
La couverture santé universelle (CSU) et la protection sociale de la santé (PSS) sont deux axes politiques essentiels qui recoupent l’ensemble des dimensions du programme des objectifs de développement durable à l’horizon 2030. La compréhension de ces deux concepts, de leurs fondements et de leurs relations permettrait d’améliorer l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de santé afin d’atteindre la CSU, de protéger efficacement la santé et les revenus des personnes, et de sauver des vies. La pandémie de COVID-19 a permis de tirer des enseignements utiles pour améliorer les activités multisectorielles visant à renforcer et à financer les systèmes de santé et de protection sociale. Cet article vise à clarifier la contribution des cadres conceptuels mondiaux sur la PSS à l’objectif stratégique de la CMU. Ce faisant, l’article contribue au débat sur le financement de la santé et la sécurité sociale, et plaide en faveur d’actions politiques intégrées, indispensables tant au niveau mondial que national. Il examine les origines des deux concepts et la pertinence de la PSS pour le financement des systèmes de santé en vue d’atteindre une couverture universelle. Bien que les situations diffèrent d’un pays à l’autre, les principales conclusions de cette analyse, en particulier pour les pays à revenu faible ou intermédiaire, sont mises en évidence et synthétisées.
Afin de mettre en place son système de couverture maladie universelle (CMU), le Sénégal a créé deux unités départementales d’assurance maladie (UDAM), dont l’objectif consistait à étendre l’assurance maladie aux communautés rurales. Cette solution innovante impliquait notamment que l’assurance maladie était non plus gérée par des bénévoles, mais bien par des professionnels. Les deux UDAM continuent de bien fonctionner plusieurs années après la fin de ce projet – qui a encouragé leur création initiale – en 2017. Cette recherche à méthodes mixtes permet d’appréhender les facteurs ayant contribué à la viabilité des deux UDAM et de s’intéresser aux défis qui restent à relever. Les mesures visant à garantir la viabilité financière et la prise de risque de l’organisation figurent parmi les facteurs favorables à la viabilité. En revanche, la mobilisation de la population, les relations avec les professionnels de la santé et le rôle de l’État ont posé plus de difficultés. Les défis résidaient quant à eux dans le paiement des subsides, la fourniture des médicaments par l’État, la collaboration avec le système de soins de santé, le maintien des cotisations, la numérisation de l’administration ainsi que les cas de fraude et d’abus.
Cet article vise à déterminer si les dépenses en matière de protection sociale diffèrent en fonction de la qualité des institutions et des préférences personnelles des membres, ainsi qu’à définir dans quelle mesure elles varient, grâce à des données de panel intersectorielles et internationales. Il exploite les données sur les dépenses qui proviennent de la base de données du Bureau international du Travail s’intéressant à 52 pays à faible et moyen revenu et à 80 pays à haut, faible et moyen revenu. Les résultats révèlent que ces deux facteurs ont une incidence dans le groupe de pays à faible et moyen revenu, mais aussi dans tous les pays de l’échantillon. Les estimations s’appuient sur différentes définitions des variables dépendantes et diverses mesures pour évaluer la qualité des institutions. Selon les résultats obtenus, il serait intéressant de continuer à renforcer la capacité des institutions et des autorités publiques, ainsi qu’à intégrer les préférences personnelles des membres quant aux interventions de la protection sociale dans les processus de planification et de budgétisation lors de la prise de décisions vis-à-vis des programmes de protection sociale et de l’allocation des ressources.
Un des mécanismes visant à influencer la redistribution du revenu via un système de pensions consiste à introduire un financement non contributif. En utilisant des outils de modélisation mathématique, cette étude compare deux mécanismes de financement du système de pensions argentin obtenus à la suite d’un exercice d’optimisation. L’un d’entre eux permet un financement via l’impôt sur le revenu, contrairement à l’autre. Ce dernier se révèle préférable en matière d’égalité et résiste aux changements de taux d’investissement et au paramètre lié à l’aversion à l’inégalité. Le recours aux outils de modélisation mathématique par les décideurs, combiné à l’accès à un nombre suffisant de données de haute qualité, permettrait d’évaluer de manière crédible dans quelle mesure une réforme paramétrique particulière pourrait (ou non) contribuer à l’amélioration de la répartition des revenus.
Cet article porte sur la viabilité du régime de retraite chinois pour les salariés vivant en milieu urbain – qui constitue la principale composante du système de retraite chinois. L’auteur examine la viabilité du programme en général et des études de cas relatives à deux zones en particulier (la municipalité de Tianjin et la province de Guangxi) pour mettre en évidence l’ampleur des disparités régionales mais aussi les défis communs auxquels sont confrontés les responsables publics chinois. Il aborde plusieurs aspects importants susceptibles d’aider les décideurs à trouver des solutions face au vieillissement de la population. Il constate que le défi à relever par la Chine n’est pas plus grand que celui auquel ont déjà été confrontés d’autres pays, en Europe et en Asie. De plus, toutes les régions du pays ne connaissent pas le même vieillissement. En conséquence, celles où le changement démographique est plus avancé constitueront un terrain de choix pour expérimenter des politiques. Selon l’article, les progrès ayant jusqu’à présent été lents en ce qui concerne diverses dimensions de la réforme du système de retraite, il est peu probable qu’un changement paradigmatique d’ampleur ait lieu. Néanmoins, l’étude recommande une série de réformes paramétriques. Le défi que doivent relever les responsables publics chinois consiste à faire en sorte que la population vieillisse mais aussi dispose de davantage de ressources.
Souvent, la protection sociale et le recouvrement des recettes sont considérés comme de potentiels facteurs de cohésion sociale. Cet article participe au débat et apporte trois principales contributions. Tout d’abord, nous étudions avec soin le concept de cohésion sociale et en entérinons une définition précise. Ensuite, nous proposons d’utiliser le concept de «contrat fiscal» comme principe théorique clé pour comprendre les éventuels effets combinés des politiques de protection sociale et de recouvrement des recettes sur la cohésion sociale, ces effets étant souvent laissés de côté. Enfin, nous présentons trois principaux mécanismes à travers lesquels ces politiques peuvent influencer de façon positive ou négative les différents composants de la cohésion sociale, et soulignons dans quelle mesure il est important que les décideurs politiques en tiennent soigneusement compte.
En règle générale, les mécanismes utilisés par les organisations de sécurité sociale pour recouvrer les cotisations et verser les prestations sont adaptés aux rapports collectifs caractéristiques de la relation employeur‐salarié. Or, pour étendre la couverture à des groupes difficiles à atteindre, il peut être nécessaire d’inventer de nouvelles modalités de prestation des services, permettant d’exécuter un grand nombre d’opérations individuelles et sécurisées plutôt qu’un petit nombre d’opérations consistant à transférer un ensemble de données entre organisations. Les évolutions récentes dans le domaine du paiement électronique montrent que ce mode de paiement peut être appliqué à grande échelle pour transférer de gros volumes de données au moyen d’opérations individuelles. Se resituant dans ce contexte, l’auteur de cet article explore les perspectives qu’offre cette technologie et identifie les modalités selon lesquelles les techniques de paiement électronique pourraient être mobilisées pour surmonter les obstacles qui empêchent les groupes difficiles à atteindre d’accéder à une couverture. Etant donné le fort taux de pénétration de la téléphonie mobile à l’échelle mondiale, l’utilisation des solutions de paiement électronique pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et la fourniture des prestations et services offre des perspectives prometteuses. L’article fait appel à un modèle générique pour décrire les éléments indispensables à l’utilisation de solutions de paiement électronique par les programmes de sécurité sociale. A partir de données empiriques relatives aux pratiques actuellement mises en œuvre par les systèmes de protection sociale dans différentes régions du monde, il présente cinq scénarios illustrant différentes configurations possibles pour le recours au paiement électronique, de la plus simple à la plus sophistiquée. L’article entend ainsi, plus largement, apporter une contribution pratique à la concrétisation de l’engagement de la communauté internationale à garantir une protection sociale pour tous, conformément aux Objectifs de développement durable pour 2030.
Thèmes:
Technologies de l'information et de la communication
En se fondant sur les données rassemblées auprès des organisations de sécurité sociale et des agences de recouvrement des cotisations, le présent article vise essentiellement à contribuer à la diffusion des connaissances et des bonnes pratiques sur le recouvrement des cotisations et des moyens de faire respecter les obligations. Si le recouvrement des cotisations et le respect des obligations ont des implications non négligeables dans les domaines de la protection sociale, politique et budgétaire, ils sont abordés ici sous l'aspect de la bonne gouvernance administrative. D'après les données étudiées, sept facteurs fondamentaux doivent généralement se conjuguer pour que le recouvrement des cotisations et le respect des obligations fonctionnent correctement. Outre le fait de renforcer l'adéquation des prestations et la santé financière ainsi que la réputation auprès du public des programmes, ce bon fonctionnement peut également encourager les efforts nationaux et internationaux entrepris pour étendre la couverture sociale. Enfin, le degré de réussite de ces activités peut être déterminé et défini par les conditions politiques nationales au sens large, sur lesquelles les organisations de sécurité sociale n'ont peu ou pas d'influence.
La gestion du respect des obligations en matière d'assurance sociale représente un problème de gouvernance particulièrement important dans les pays émergents dont les régimes de réglementation souffrent de lacunes. En s'appuyant sur des données qualitatives issues de huit études de cas menées à Shanghai, en République populaire de Chine, le présent article analyse de façon approfondie la manière dont les employeurs répondent aux tentatives de l'Etat de gérer leurs comportements envers l'assurance sociale. Le sentiment des employeurs et leurs réactions aux politiques en place et aux structures de réglementation traduisent cinq préoccupations principales: l'élaboration d'une politique efficace, une réglementation équitable, le contrôle des coûts, la réputation de leur entreprise et le recrutement et la fidélisation de leur personnel. Ces données indiquent également que trois éléments inhérents aux entreprises peuvent exercer une incidence sur le respect des obligations: les facteurs de risque, les compétences de leur personnel et leur type de propriété. Il avait été supposé que la taille de l'entreprise pouvait également influer sur le respect des obligations en matière d'assurance sociale, mais les données n'ont rien révélé de patent en ce sens.